Instaurée en France sous la présidence de Nicolas Sarkozy en 2012, la taxe sur les transactions financières (TTF) a pour objectifs de :
- Réguler les échanges d’actions sur les marchés financiers, qui échappaient jusqu’alors au contrôle de l’administration fiscale ;
- Répondre aux déséquilibres, aux crises et aux inégalités dus à la mondialisation.
La TTF vise ainsi à taxer la finance, un secteur profitant de la mondialisation et de la volatilité des marchés en période de crises, pour redistribuer aux “perdants” de la mondialisation, par l’intermédiaire de l’aide publique au développement (APD). Une partie des revenus de la TTF est ainsi affectée au Fonds de solidarité pour le développement (FSD), qui permet de financer des programmes visant à réduire les inégalités mondiales, en améliorant notamment l’accès aux soins ou à l’éducation pour les populations les plus pauvres, et en finançant des actions de lutte contre les changements climatiques.
En 2019, la part affectée des recettes de la TTF au FSD a été abaissée à 528 millions d’euros. Depuis, les recettes de la TTF ont battu des records en augmentant de plus de 50% entre 2019 et aujourd’hui : alors que le monde traverse une multitude de crises, la politique de solidarité internationale, et ses bénéficiaires dans les pays les plus pauvres, ne bénéficient donc pas de la croissance exponentielle des revenus de la TTF.
La politique française de développement s’appuie aussi sur des ressources extrabudgétaires : le Fonds de solidarité pour le développement (FSD) est alimenté par une partie des recettes de la taxe sur les transactions financières (TTF) et de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA). Le FSD est primordial en ce qu’il sert à financer des fonds multilatéraux menant la réponse globale aux défis sanitaires et climatiques.
Lors de la dernière législature, des député·e·s de tous bords politiques se sont mobilisés pour taxer plus les transactions financières et en faire bénéficier davantage la solidarité internationale. Alors que la pauvreté et les inégalités continuent de s’aggraver, cet outil de justice fiscale est crucial.
Cette année, les débats autour de la TFF seront de nouveau au rendez-vous, avec plusieurs amendements déposés par des député·e·s de 6 groupes politiques en Commission des finances. Mais chaque année, ces amendements sont rejetés au motif de craintes infondées et d’arguments fallacieux. Pour éviter toute confusion, Action Santé Mondiale passe en revue les 7 intox les plus populaires sur la TTF :
Depuis la mise en place de la TTF, Bercy n’a enregistré aucune perte d’attractivité de la place de Paris ou d’impacts négatifs sur le financement de l’économie française, et ce malgré l’augmentation progressive du taux de taxation de 0,1% à 0,3% (Source : DPT 2020, Politique française en faveur du développement, p.118).
Le phénomène inverse peut toutefois être observé : lorsque l’économie française a été frappée par des crises, notamment en 2020 et 2022, les transactions financières ont prospéré. Depuis 2019, les recettes de la TTF ont augmenté d’environ 50% et l’Etat prévoit plus de 2,24 milliards de recettes en 2023, un record depuis sa création. Selon l’index GFCI, Paris est entré dans le top 10 des places boursières mondiales en 2021, devenant la première place de l’UE, mais toujours loin derrière Londres. La Stamp Duty (TTF) britannique, refondée en 1986 avec un taux de 0,5%, n’est pas responsable d’une baisse de la compétitivité de Londres, qui maintient sa 2ème place dans le classement GFCI, et cela malgré le Brexit.
La TTF ne taxe pas l’économie réelle, c’est-à-dire qu’elle ne vise pas les ménages ni l’immense majorité des entreprises. Elle ne s’applique qu’aux transferts d’actions des grandes entreprises : seules les sociétés dont la capitalisation boursière dépasse un milliard d’euros sont concernées par cette taxe, soit seulement 147 entreprises en 2022.
La spéculation financière peut quant à elle être une source de risques pour l’économie réelle et les emplois, comme l’a démontré la crise de 2008. La TTF vise notamment à pénaliser la spéculation de court terme et attache davantage les investisseurs aux performances de long terme des entreprises dans lesquelles ils investissent, avec des effets bénéfiques pour l’économie réelle. C’est d’ailleurs à cet effet que la TTF a été instaurée par le président Nicolas Sarkozy, à la suite de la crise économique de 2008. Cette taxe est d’ailleurs soutenue par les plus grands économistes dans le monde entier, dont Gabriel Zucman en France.
Paris est la place financière la plus compétitive de l’UE, bien devant Francfort, Madrid et Amsterdam. La TTF ne joue en rien sur sa compétitivité. Renforcer la TTF française serait un signal fort qui permettrait de positionner la France en fer de lance des débats sur la mise en place d’une TTF européenne. Au sein de l’Union européenne, six autres États-membres ont déjà mis en place une TTF : la Belgique, la Finlande, l’Irlande, l’Italie, la Pologne et l’Espagne. Aucune démonstration d’un quelconque impact sur la compétitivité de leur place financière n’a été observée.
Les crises que nous traversons depuis 2020 ont altéré les progrès de développement durement acquis. Pour la première fois depuis les années 1990, l’extrême pauvreté augmente et l’indice de développement humain a diminué pour la deuxième année consécutive.
Les 860 millions d’euros supplémentaires pour l’APD pilotable sont donc plus que nécessaires, mais ne seront utiles que s’ils sont utilisés pour répondre aux besoins cruciaux des populations les plus vulnérables, tels que l’accès à la santé, à l’eau et à l’éducation. En moyenne, seulement 18% de l’APD française finance ces services sociaux de base, une programmation incohérente avec les besoins. Santé, éducation, lutte contre les changements climatiques : c’est justement ce que finance la TTF à travers le FSD.
La TTF a été mise en place avec un double objectif : prévenir les conséquences de la spéculation et répondre aux déséquilibres et inégalités dus à la mondialisation. Ainsi, et depuis sa mise en place en 2012, les recettes de la TTF sont en partie allouées au FSD. Le Président de la République Emmanuel Macron s’est par ailleurs engagé à affecter des recettes de la TTF pour financer la lutte contre le changement climatique et les grandes pandémies, via les agences multilatérales (source: DPT APD 2020). Une plus grande affectation au FSD est nécessaire car les efforts budgétaires ne sont pas suffisants pour mettre en place la feuille de route de politique internationale du gouvernement.
La TTF est une initiative du Président Nicolas Sarkozy, du groupe politique Les Républicains. Depuis sa mise en place en 2012, des député·e·s de tous bords politiques portent des amendements pour renforcer la TTF et allouer davantage de ses recettes à la solidarité internationale. Par exemple, Hugues Renson, député En Marche, vice-président de l’Assemblée Nationale lors de la législature 2017-2022 ou encore des députés du groupe Les Républicains, qui avaient déposé une proposition de loi pour renforcer la TTF en 2019.