Les responsables d’Action Santé Mondiale, AIDES, Coalition Plus, Equipop, ONE, Oxfam France, Médecins du Monde, Sidaction et Solthis pointent du doigt la faiblesse de l’investissement français pour la santé mondiale comparée aux ambitions affichées d’Emmanuel Macron et appellent la France à corriger le tir en adoptant des objectifs précis dans les mois à venir.
Durant la campagne pour sa réélection, Emmanuel Macron nous l’affirmait : “La santé a été retenue comme l’un des axes prioritaires de notre coopération internationale”. Cela devrait en effet être la priorité de tous les pays du monde depuis la pandémie que nous avons vécue. Pourtant, le compte n’y est pas. Nos analyses des chiffres disponibles nous font douter du caractère prioritaire prétendument accordé à la santé mondiale. Nos associations interpellent les pouvoirs publics pour corriger cette inadéquation des discours et des moyens.
Si les montants totaux pour la santé ont effectivement augmenté ces dernières années, pour atteindre 1,2 milliard d’euros en 2020, cette hausse est concomitante d’une augmentation plus large de l’ensemble de l’aide publique française au développement (APD). Derrière cette tendance en apparence positive, les moyens consacrés à la santé stagnent en moyenne à 7 % ces cinq dernières années. Alors que l’OMS recommande aux pays donateurs de consacrer l’équivalent de 0,1% de leur RNB à l’aide en santé, la France plafonne à 0,053%.
On aurait pu penser qu’une crise sanitaire mondiale ferait bondir l’aide en santé mondiale, mais ce n’est pas le cas. La faiblesse des investissements pour la santé se reflète aussi dans la réponse internationale de la France à la crise Covid-19. Visiblement ni la pandémie, ni le rebond consécutif des maladies liées à la pauvreté, ni l’importance flagrante de renforcer les systèmes de santé n’auront permis de changer la donne. Pour preuve, les montants accordés à la santé dans le contrat d’objectifs et de moyens de l’Agence française de développement. Adopté à l’été 2021 alors que la France était entre deux vagues de la pandémie qui secouait encore la planète entière, la cible pour la santé et la protection sociale passe de 10 % en 2020 à seulement 3 % pour 2021 et 2022.
Face à ces chiffres, comment la France peut encore affirmer que la santé est un axe prioritaire de sa coopération internationale ? Pourquoi l’allant politique d’Emmanuel Macron lors de la crise Covid-19 semble ignoré lorsqu’il s’agit de se mobiliser financièrement ? La faiblesse des chiffres constatés et des engagements actés éclipsent l’ambition affichée.
Il faut mieux se préparer aux menaces sanitaires à venir : c’est une évidence autant qu’un impératif. La France doit drastiquement changer de cap en accompagnant les discours de mesures concrètes, et en dotant la santé de moyens requis par l’ampleur des besoins.
En juillet 2022, la Première ministre affirmait lors de sa déclaration de politique générale l’aspiration du gouvernement de maintenir la place de leadership de la France sur la scène internationale. Elisabeth Borne annonçait ainsi “plus d’effort en matière de solidarité, une ambition accrue pour les défis globaux comme la santé et le changement climatique”. Pour y parvenir, deux solutions : réaffirmer l’objectif de consacrer 0,7% du RNB à l’APD d’ici 2025, et fixer des cibles financières pluriannuelles ambitieuses en faveur de la santé mondiale. La révision en cours de la stratégie de la France pour la santé mondiale et l’annonce pour le début de l’année prochaine d’un Comité interministériel de la coopération internationale et du développement sont l’occasion d’aligner l’ambition et les moyens dédiés.
Signataires :
Action Santé Mondiale – Patrick Bertrand – Directeur Exécutif
AIDES – Marc Dixneuf – Directeur Général
Coalition Plus – Vincent Leclercq – Directeur Général
Equipop – Aurélie Gal-Régniez – Directrice Exécutive
Médecins du Monde – Dr Florence Rigal – Présidente
ONE – Najat Vallaud-Belkacem – Directrice France
Oxfam France – Cécile Duflot – Directrice Générale
Sidaction – Florence Thune – Directrice Générale
Solthis – Dr Serge Breysse – Directeur Général