EssentiELLES #5
« La COVID est une crise dont le visage est bel et bien féminin ». C’est en ces mots que s’exprimait la directrice de l’UNFPA, le Dr Natalia Kanem, lors de son discours d’ouverture de la 54e session de la Commission sur la population et le développement, pour souligner l’impact disproportionné de la pandémie de Covid-19 sur les femmes et les filles. Un an après le début de la pandémie de Covid-19, les observations font déjà état d’un recul généralisé sur les progrès accomplis en matière de santé sexuelle et reproductive des femmes et des filles. Une étude de l’OMS souligne ainsi qu’en moyenne 35% des pays interrogés rapportent une perturbation des services de santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile, et adolescente. Les observations mettent notamment en évidence une chute de la disponibilité des services de santé sexuelle et reproductive, notamment de planification familiale ou de dépistage du VIH/Sida, mais aussi au sein des programmes dispensant une éducation complète à la sexualité et des activités de prévention ou d’intervention en cas de violences sexuelles et sexistes.
L’interruption voire la fermeture de ces services de santé sexuelle et reproductive s’explique notamment par la mise en place de procédures d’adaptation visant à décharger les systèmes de santé, limiter la propagation du virus et reprioriser la prestation de soins vers les unités de traitement Covid-19. Cela s’est notamment traduit par une réallocation des ressources financières et matérielles vers la réponse à la pandémie, au détriment des services de santé sexuelle et reproductive. De fait, le personnel de santé a dû se concentrer massivement sur la réponse à la pandémie et s’est donc vu détourné d’autres services de santé pourtant essentiels tels que la planification familiale. D’autre part, la pandémie a également induit des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement en équipement, médicaments et produits de santé essentiels en matière de santé sexuelle et reproductive, tels que les implants, les tests de grossesse, les produits contraceptifs, ou encore les traitements des infections sexuellement transmissibles. Alors qu’ils sont un service de base, les DSSR continuent d’être un sujet fortement politisé, régulièrement remis en cause notamment en temps de crises. L’interruption des services de santé sexuelle et reproductive, perçus comme non-essentiels par de nombreux gouvernements, témoigne des conséquences de cette politisation.
La pandémie a également entraîné une diminution de la demande en matière de santé sexuelle et reproductive et de services de planification familiale. Par exemple, en Guinée, le gouvernement a reporté une baisse de 31% des visites au sein des structures de santé dans la capitale à Conakry. Cette baisse s’explique notamment par la crainte des usager.e.s d’être contaminé.e.s par le virus en se rendant dans des centres de santé. Cette diminution de la fréquentation des centres s’explique également par l’adoption de mesures nationales pour limiter la propagation du virus, telles que le confinement ou le couvre-feu. Ces mesures ont compliqué les possibilités de déplacement pour les femmes et les filles et donc renforcé le contrôle social exercé sur elles, limitant ainsi leur capacité à prendre des décisions autonomes sur leur corps. De nombreux rapports évoquent également l’intensification des violences basées sur le genre à l’égard des femmes et des filles, notamment du fait de ces mesures. Elles ont également entraîné la fermeture d’écoles et de centres dans lesquels étaient dispensés des enseignements sur la sexualité et la reproduction ainsi que des activités de sensibilisation et de mobilisation des communautés, ce qui a considérablement réduit l’accès à l’information pour de nombreuses femmes et filles. Enfin, une étude conjointe de l’UNFPA et d’ONU Femmes en Afrique l’Est et du Sud souligne également l’augmentation de l’insécurité économique grandissante chez les femmes et les filles, qui les aurait non seulement exposées à l’impossibilité d’accéder aux soins dont elles ont besoin mais également de se fournir en produits de base, tels que les serviettes hygiéniques.
Les droits et la santé sexuels et reproductifs des femmes et des filles sont des droits humains fondamentaux non négociables. Ils doivent continuer d’être une priorité de santé des gouvernements, y compris en temps de crise, et faire partie intégrante de leur réponse à la pandémie de Covid-19.