EssentiELLES #6
Globalement, “le FGE a permis de cristalliser certaines dynamiques diplomatiques en faveur de l’égalité de genre, et c’était une étape importante à ce niveau” explique Lucie Daniel, Experte plaidoyer à Equipop. Cependant, si les engagements de la France marquent un petit pas en faveur de la réalisation des droits et de la santé sexuels et reproductifs, “le Forum devait mener à des actions concrètes. Elles ne sont pour l’instant pas toutes identifiables ni mesurables, et dans le cas spécifique de la France, l’engagement financier reste en-deçà des attentes des mouvements féministes et peine à s’incarner dans les prises de position présidentielle.” d’après Alice Ackermann, membre du Bureau confédéral du Planning familial, qui affirme également que “la France a manqué d’ambition sur le plan international. Pourtant championne de la coalition d’action sur les droits et la santé sexuels et reproductifs (DSSR), elle n’a pas su mettre l’argent sur la table pour répondre à l’urgence de la situation partout dans le monde.” Entre les impacts catastrophiques provoqués par la pandémie de Covid-19 sur la santé des femmes, la montée en puissance des mouvements anti-choix ou encore les coupes budgétaires britanniques opérées sur le financement international dédié à ces enjeux, le FGE constituait effectivement un moment clef pour inverser la tendance. Elle rappelle par ailleurs que “sur le plan national, les associations féministes attendent encore des annonces notamment sur le droit à l’avortement et à l’éducation à la sexualité ainsi que pour la lutte contre les violences basées sur le genre”.
Le président Emmanuel Macron l’a dit lui-même : le droit des femmes à disposer librement de leur corps est un droit humain fondamental qui n’est pas négociable. Pour Marie Ba, Directrice de l’Unité de Coordination du Partenariat de Ouagadougou, “le respect et le renforcement des droits sexuels et reproductifs de nos jeunes filles et femmes est primordial afin de leur faciliter leur prise en compte effective dans la vie active, le marché du travail mais au-delà de ça, leur épanouissement et intégrité physique.” Face aux nombreux défis persistants, “la coalition DSSR se doit de défendre le droit à disposer de son corps de façon inconditionnelle pour et surtout avec toutes les femmes, personnes trans et LGBQI” de manière inclusive et plurielle, rappelle Marie Lussier, Référente plaidoyer sur les Droits et santé sexuels et reproductifs à Médecins du Monde. Or, l’engagement financier de la France est principalement composé de sa contribution au programme UNFPA Supplies à hauteur de 18 millions d’euros annuels sur les 5 prochaines années, “un engagement qui demeure bien en deçà d’autres contributeurs tels que le Canada, le Danemark ou encore l’Allemagne. Par ailleurs, malgré le leadership affiché de la France sur ces enjeux, son aide publique au développement demeure encore bien faible par rapport à d’autres partenaires champions sur ces questions, et les nouveaux engagements ne permettent pas de rattraper ce retard.” explique Laurianne Desquesses, chargée de plaidoyer à Action Santé Mondiale.
Le processus du FGE a permis l’émergence et le renforcement d’une société civile féministe française et internationale plurielle très mobilisée et oeuvrant au quotidien en faveur de l’égalité femmes-hommes. Cette dynamique s’incarne notamment dans le Collectif Générations Féministes, composé d’une cinquantaine d’organisations rassemblant des ONG internationales, des associations féministes locales à travers un féminisme intersectionnel et une volonté de diversité. Pour Marie Lussier, membre du Collectif Générations Féministes, “un processus comme celui du FGE nous pousse à nous allier et, au regard de la déception face aux annonces, c’est finalement cette synergie, cette énergie et la diversité et complémentarité de nos identités et sujets portés que je retiens.” Le Forum Génération Égalité marque donc un “premier pas, qui nous permet d’avancer vers une direction commune, qu’il nous faudra continuer d’orienter et de consolider ensemble.” explique Mahia Adam de Villiers, assistante chargée des programmes et partenariats à Amref France. Désormais, pour Marie Ba, “au-delà des manifestations et évènements, le vrai bilan sera tiré après le suivi des engagements et la concrétisation des décisions prises par les différentes parties prenantes”. D’après Mahia Adam de Villier, “il nous faut donc maintenir le plaidoyer, tout en construisant et en renforçant la relation avec tous les partenaires techniques et financiers, toujours en veillant à prioriser les besoins du terrain exprimés par les Etats soutenus”. Nos organisations restent donc, maintenant plus que jamais, mobilisées afin d’assurer la concrétisation des engagements politiques et financiers de la France sur les enjeux de droits et santé sexuels et reproductifs et de faire avancer les progrès en faveur de l’égalité femmes-hommes.