Nous avons organisé en collaboration avec Solthis un voyage d’étude parlementaire au Niger du 4 au 8 juin dernier. La délégation était composée des trois parlementaires suivants : Philippe Kaltenbach, sénateur des Hauts-de-Seine et président du groupe d’amitié France-Niger, Michel Terrot, député du Rhône et secrétaire de la commission des affaires étrangères et Boinali Saïd, député de Mayotte et membre de la commission des affaires étrangères.
L’objectif de ce voyage d’étude était de comprendre quelles politiques ont permis la réduction de la mortalité des enfants de moins de cinq ans ces dix dernières années et d’analyser le rôle de la France dans la réalisation de ces progrès.
Les rencontres avec les acteurs institutionnels ont permis d’exposer les tenants et les aboutissants de la politique de gratuité, notamment en faveur des soins pour les enfants de moins de 5 ans. La suppression du paiement direct de l’usager a ainsi permis une augmentation de la fréquentation des centres de santé et en conséquence une augmentation du nombre d’enfants pris en charge. M. le ministre de la santé publique Mano Aghali a mis l’accent sur la décentralisation afin d’augmenter la couverture médicale et lever les barrières d’accessibilité géographiques. La décentralisation est une condition indispensable de la mise en œuvre et de la réalisation des objectifs du Plan de développement sanitaire (PDS).
Les visites du Centre de santé intégré (CSI) de Madina et du service pédiatrique de l’hôpital de Niamey ont cependant souligné le problème des arriérés de remboursement de la gratuité de la part de l’Etat qui induit des ruptures de stocks d’intrants. Lors de la visite du CSI de Madina, les vaccins contre la tuberculose par exemple n’étaient pas disponibles. La rencontre avec la responsable du Programme élargi de vaccination (PEV) lors de la visite du dépôt central nous a permis de tracer le parcours d’acheminement des vaccins depuis la centrale d’achat jusqu’aux districts de santé et de comprendre comment les ruptures de stocks pouvaient survenir.
En somme, la politique de gratuité menée par le gouvernement témoigne de la volonté politique de mettre fin aux décès évitables des enfants de moins de cinq ans, mais des problèmes de gestion et de financement mettent en question sa pérennité, d’autant plus que la démographie galopante risque d’augmenter la demande et d’amplifier la pression sur des ressources financières et humaines trop limitées.
Grâce à l’Initiative Santé Solidarité Sahel (I3S) dont le financement est issu de la Taxe sur les transactions financières, la France s’engage à pallier les lacunes de cette politique de gratuité par le biais de l’assistance technique. Le projet I3S au Niger est le premier projet octroyé parmi les cinq pays du Sahel ciblés. Il va permettre de réformer la chaine des dépenses, notamment en jetant les jalons de la mise à jour des coûts des différentes prestations de santé et de la décentralisation de la gestion des ressources à l’échelle des districts.
La France est un partenaire privilégié du Niger. Elle est ainsi le premier contributeur du Fonds Commun qui appuie le financement du PDS, un mécanisme qui permet une meilleure harmonisation entre les Partenaires techniques et financiers participants et un meilleur alignement des bailleurs sur les priorités du pays partenaires, conformément aux principes de la Déclaration de Paris.
La réunion avec les ONG nationales et internationales a offert un panorama diversifié des différentes interventions au niveau communautaire. L’action au niveau primaire de la pyramide du système de santé a l’avantage de fournir des prestations adaptées à la demande des populations et d’atteindre des groupes sociaux marginalisés peu accessibles pour le niveau central. L’enjeu est donc de mettre à l’échelle ces pratiques afin de pérenniser les progrès relatifs à la mortalité des enfants de moins de cinq ans et d’accélérer la tendance à la baisse de la mortalité néo-natale et maternelle.
Ce voyage d’étude a dès lors permis de comprendre que des stratégies ciblées et à haut impact – telles que l’intégration de la vaccination de rattrapage ou la supplémentation en vitamines et en compléments alimentaires après les 6 mois d’allaitement exclusif dans les CSI- sont la clé de la réduction de la mortalité infantile. Pourtant beaucoup d’efforts doivent être encore fournis pour pérenniser les progrès et pallier les manques de financements et la pression démographique.
La France a prouvé son expertise dans le domaine de la santé materno-infantile à la fois à l’échelle du Niger qu’à l’échelle internationale. Son action est indispensable pour l’avenir du pays par le biais du canal bilatéral, le Fonds Commun par exemple, que par le biais du canal multilatéral, grâce à sa contribution à l’Alliance GAVI dont elle le cinquième contributeur mondial.